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Une enquête interne « ne constitue pas une preuve déloyale comme issue d’un procédé clandestin de surveillance de l’activité du salarié ».

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Dans un arrêt rendu le 5 octobre 2023 (RG n° 21/03506), la Cour d’appel d’Aix-en-Provence valide le licenciement pour faute grave d’une salariée en s’appuyant sur l’enquête interne diligentée par l’employeur.

 

La salariée faisait valoir en substance que l’enquête interne avait été menée avec partialité et déloyauté par des salariés placés sous la subordination de l’employeur, sans respecter le principe du contradictoire, qu’elle n’avait pas été prévenue de l’existence de l’enquête, ni entendue au cours de celle-ci et qu’elle n’avait pas eu accès au compte-rendu de l’enquête. Cet argument est balayé par la Cour d’appel. Selon les juges :

 

  • une enquête effectuée au sein d’une entreprise à la suite de la dénonciation de faits de harcèlement moral n’est pas soumise aux dispositions de l’article L. 1222-4 du code du travail et ne constitue pas une preuve déloyale comme issue d’un procédé clandestin de surveillance de l’activité du salarié.


  • le respect des droits de la défense et du principe de la contradiction n’impose pas que, dans le cadre d’une enquête interne destinée à vérifier la véracité des agissements dénoncés par d’autres salariés, le salarié visé ait accès au dossier et aux pièces recueillies ou qu’il soit confronté aux collègues qui le mettent en cause ni qu’il soit entendu, dès lors que la décision que l’employeur peut être amené à prendre ou les éléments dont il dispose pour la fonder peuvent, le cas échéant, être ultérieurement discutés devant les juridictions de jugement.

  • l’enquête diligentée par le CHSCT à la suite des dénonciations de faits susceptibles de constituer un harcèlement moral n’étant pas soumise au respect du principe du contradictoire, elle pouvait être régulièrement menée à l’insu de la salariée, sans information préalable ni audition de cette dernière, peu important donc de savoir si la salariée avait effectivement été contactée par le CHSCT dans le cadre de cette enquête.

La Cour d’appel se rallie ce faisant à la jurisprudence de la Cour de cassation, laquelle avait déjà considéré, dans un arrêt du 29 juin 2022 (n° 20-22.220) que le respect des droits de la défense et du principe de la contradiction n’impose pas que le salarié ait accès au dossier et aux pièces recueillies ou qu’il soit confronté aux collègues qui le mettent en cause ni qu’il soit entendu, dès lors que la décision de l’employeur ou les éléments dont il dispose pour la fonder peuvent, le cas échéant, être ultérieurement discutés devant les juridictions de jugement.

 

Il convient toutefois d’être vigilant sur ce point dans la mesure où d’autres Cours d’appel retiennent au contraire que l’enquête doit menée à charge et à décharge et que le salarié mis en cause doit être mis en mesure de faire entendre ses témoins.

 

La Cour d’appel juge ensuite :

 

  • qu’eu égard au compte-rendu d’enquête versé aux débats par la société, ses résultats apparaissent neutres et objectifs dans la mesure où ils sont fondés sur les auditions individuelles de 22 salariés occupant des postes en lien avec la ligne de caisses (18 hôtesses de caisse et 2 responsables adjointes, 1 salarié en rayon mais intervenant régulièrement en caisse, ainsi qu’une ex-employée, hôtesse de caisse). Ces derniers ont répondu à questionnaire identique, permettant de recueillir des témoignages circonstanciés et divers dans leurs termes et la description des situations vécues.

  • l’enquête interne n’est pas le seul élément de preuve produit par la société et le conseil de prud’hommes ne s’est pas fondé uniquement sur les témoignages anonymisés présentés dans le compte-rendu d’enquête, puisqu’il résulte des motifs du jugement entrepris qu’il s’appuie aussi sur le témoignage d’une autre salariée, lequel accable tout autant la salariée de manière concordante.

Cette motivation fait écho à l’arrêt récent de la Cour de cassation du 19 avril 2023 (pourvoi n° 21-21.310), aux termes duquel si le juge ne peut fonder sa décision uniquement ou de manière déterminante sur des témoignages anonymes, il peut néanmoins prendre en considération des témoignages anonymisés, c’est-à-dire rendus anonymes a posteriori afin de protéger leurs auteurs mais dont l’identité est néanmoins connue par l’employeur, lorsque ceux-ci sont corroborés par d’autres éléments permettant d’en analyser la crédibilité et la pertinence.

 

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