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Alerte exercée par les membres élus au sein du CSE : le temps passé à l’exercice du droit d’alerte s’impute sur les heures de délégation

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Dans une décision rendue le 9 novembre 2022 (n°21-16230), la Chambre sociale de la Cour de cassation a rappelé que le temps passé par les membres de la délégation du personnel au CSE à l’exercice de leur droit d’alerte en cas d’atteinte aux droits des personnes s’impute sur leur crédit d’heures de délégation.

En l’espèce, des membres élus au sein du CSE d’un Etablissement public et industriel avaient informé l’employeur de ce qu’ils entendaient faire usage de leur droit d’alerte sur le fondement de l’article L. 2312-59 du Code du travail (pour un motif lié à une discrimination à l’encontre d’une salariée).

Dans ce cadre, l’employeur a convié les membres élus du CSE à une réunion, à laquelle certains d’entre eux ont assisté.

Les membres de la délégation du personnel au CSE ont saisi la juridiction prud’homale de demandes tendant à voir condamner l’employeur au versement aux demandeurs présents à la réunion du CSE relative à l’alerte, la rémunération afférente au temps passé à cette réunion. En effet, ces derniers considéraient que le temps passé à cette réunion devait être rémunéré comme du temps de travail effectif, sans être déduit des heures de délégation.

La Cour d’appel ayant fait droit aux demandes des élus du CSE, l’employeur a formé un pourvoi en cassation.

La Haute Cour, aux termes de son arrêt du 9 novembre 2022, censure la décision des juges du fond au visa des articles L. 2312-59 et L .2315-11 du Code du travail, en considérant que :

« Vu les articles L. 2312-59 et L. 2315-11 du code du travail :

6. L’article L. 2312-59, alinéas 1er et 2, du code du travail dispose que si un membre de la délégation du personnel au comité social et économique constate, notamment par l’intermédiaire d’un travailleur, qu’il existe une atteinte aux droits des personnes, à leur santé physique et mentale ou aux libertés individuelles dans l’entreprise qui ne serait pas justifiée par la nature de la tâche à accomplir, ni proportionnée au but recherché, il en saisit immédiatement l’employeur. Cette atteinte peut notamment résulter de faits de harcèlement sexuel ou moral ou de toute mesure discriminatoire en matière d’embauche, de rémunération, de formation, de reclassement, d’affectation, de classification, de qualification, de promotion professionnelle, de mutation, de renouvellement de contrat, de sanction ou de licenciement. L’employeur procède sans délai à une enquête avec le membre de la délégation du personnel du comité et prend les dispositions nécessaires pour remédier à cette situation.

7. Selon l’article L. 2315-11 du même code, est également payé comme temps de travail effectif le temps passé par les membres de la délégation du personnel du comité social et économique :

1° à la recherche de mesures préventives dans toute situation d’urgence et de gravité, notamment lors de la mise en œuvre de la procédure de danger grave et imminent prévue à l’article L. 4132-2 ;

2° aux réunions du comité et de ses commissions, dans ce cas dans la limite d’une durée globale fixée par accord d’entreprise ou à défaut par décret en Conseil d’Etat ;

3° aux enquêtes menées après un accident du travail grave ou des incidents répétés ayant révélé un risque grave ou une maladie professionnelle ou à caractère professionnel grave ;

Ce temps n’est pas déduit des heures de délégation prévues pour les membres titulaires de la délégation du personnel du comité social et économique.

8. Il résulte de ces textes que le temps passé par les membres de la délégation du personnel au comité social et économique à l’exercice de leur droit d’alerte en cas d’atteinte aux droits des personnes s’impute sur leur crédit d’heures de délégation.

9. Pour condamner la RATP à payer à MM. [N] et [B] le temps passé à la réunion du 16 janvier 2019 comme temps de travail effectif sans qu’il soit déduit de leurs heures de délégation, l’arrêt retient que la réunion du 16 janvier 2019, sollicitée par les élus, a été organisée par la direction du dépôt de La Croix Nivert, qu’ainsi, le temps passé à cette réunion par les élus du comité social et économique constitue du temps de travail effectif et ne peut pas être déduit de leur temps de délégation, l’atteinte aux droits des personnes constituant une situation d’urgence et de gravité, « de sorte que des mesures préventives aient pu être prises ».

10. En statuant ainsi, alors qu’elle avait constaté que la réunion du 16 janvier 2019 avait été organisée par l’employeur à la demande des membres de la délégation du personnel au comité social et économique ayant exercé leur droit d’alerte en cas d’atteinte aux droits des personnes, ce dont il résultait que le temps passé à ladite réunion devait être déduit de leur crédit d’heures de délégation, la cour d’appel a violé les textes susvisés. »

La Cour de cassation rappelle ainsi que les hypothèses dans lesquelles le temps passé par les élus du CSE est rémunéré comme temps de travail effectif, prévues par l’article L.2315-1 du Code du travail, ont un caractère limitatif et restrictif, de sorte que l’exercice du droit d’alerte ne peut s’analyser en une « situation d’urgence et de gravité » ouvrant droit à ce type de rémunération.

https://www.courdecassation.fr/decision/636b6e6367b11ddcd1c424f0?search_api_fulltext=21-16230&op=Rechercher%20sur%20judilibre&date_du=&date_au=&judilibre_juridiction=all&previousdecisionpage=&previousdecisionindex=&nextdecisionpage=&nextdecisionindex=

 

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