La Cour de cassation a opéré, le 10 septembre 2025, un revirement majeur en matière de congés payés : elle reconnaît désormais le droit pour un salarié tombant malade pendant ses congés d’en reporter la prise. La haute juridiction met ainsi fin à une jurisprudence constante depuis 1996.
Ce revirement était attendu. En effet, le droit de l’Union européenne, tel qu’interprété par la Cour de justice de l’UE depuis 2012, consacre depuis longtemps le principe du report. La position française apparaissait donc isolée et non conforme aux exigences européennes.
C’est dans ce contexte que la Commission européenne a mis en demeure la France, le 18 juin dernier, de se mettre en conformité. Le ministère du Travail, anticipant cette évolution, avait d’ailleurs déjà recommandé aux employeurs, sur son site internet à la page dédiée aux congés payés, d’appliquer directement la règle européenne « afin d’éviter tout contentieux inutile ».
C’est désormais chose faite.
Dans son arrêt du 10 septembre (numéro de pourvoi 23-22.732), la chambre sociale retient que :
« Dès lors, il convient de juger désormais qu’il résulte de l’article L. 3141-3 du code du travail, interprété à la lumière de l’article 7, paragraphe 1, de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil, du 4 novembre 2003, concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail, que le salarié en situation d’arrêt de travail pour cause de maladie survenue durant la période de congé annuel payé a le droit de bénéficier ultérieurement des jours de congé payé coïncidant avec la période d’arrêt de travail pour maladie.
Il en résulte que c’est par une exacte application de la loi que la cour d’appel a retenu que la salariée, qui avait fait l’objet, durant ses périodes de congés payés, d’arrêts de travail pour cause de maladie notifiés à l’employeur, pouvait prétendre au report des jours de congé correspondants, qui ne pouvaient pas être imputés sur son solde de congés payés. »
Le communiqué diffusé par la Cour de cassation à la suite de la parution de cet arrêt insiste sur la différence de finalité entre congé payé et arrêt maladie : le premier vise le repos et les loisirs, le second le rétablissement. Dès lors que la maladie prive le salarié du bénéfice de ses vacances, le report doit être admis. La Cour précise toutefois que ce droit au report suppose que l’arrêt maladie soit notifié à l’employeur, condition indispensable pour en bénéficier.
Ce revirement a des conséquences pratiques immédiates pour les entreprises. Il impose d’adapter les politiques de gestion des congés payés, de revoir les pratiques RH et de sensibiliser les managers. Certains salariés pourraient aussi se saisir de cette décision afin d’introduire des demandes de rappels de congés payés, dans un cadre amiable comme contentieux. Les employeurs devront donc se montrer particulièrement vigilants dans le suivi des arrêts et des soldes de congés, afin de limiter les risques juridiques et financiers.
Le cabinet Voltaire reste à votre disposition pour évoquer les impacts pratiques de cette décision et les mesures d’adaptation à mettre en œuvre.