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Inaptitude d’origine professionnelle : rappels de la Cour de cassation

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De jurisprudence désormais constante, les règles protectrices applicables aux victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle s’appliquent dès lors que l’inaptitude du salarié, quel que soit le moment où elle est constatée ou invoquée, a au moins partiellement pour origine cet accident ou cette maladie, et que l’employeur avait connaissance de cette origine professionnelle au moment du licenciement (Cass. Soc. 10 juillet 2002, n° 00-40.436).

 

Il appartient dès lors aux juges, saisis de demandes tendant à l’application de ces dispositions protectrices, de vérifier de leur propre mouvement si l’inaptitude a bien été causée par une maladie professionnelle ou un accident de travail.

 

La Cour de cassation vient de le rappeler expressément, dans un arrêt rendu le 18 septembre 2024 (Cass. Soc. 18 septembre 2024, n° 22-17.737)  :

 

« Pour débouter la salariée de sa demande au titre de l’indemnité spéciale de licenciement, l’arrêt retient que l’inaptitude est consécutive à un arrêt maladie de droit commun, que son origine professionnelle n’a pas été retenue et que la salariée n’a pas davantage demandé en justice que le caractère professionnel de sa maladie soit reconnu.

 

En se déterminant ainsi, par des motifs inopérants, sans rechercher si l’inaptitude avait au moins partiellement pour origine un accident du travail ou une maladie professionnelle et si l’employeur avait connaissance de cette origine au moment du licenciement, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision ».

 

Aux termes d’une autre décision rendue le même jour, la Cour de cassation a souligné que la compétence du juge prud’homal est néanmoins circonscrite à l’appréciation du lien entre l’accident du travail ou la maladie professionnelle et l’inaptitude physique du salarié.

 

Il ne lui appartient en revanche pas de se prononcer sur le caractère professionnel ou non d’un accident ou d’une maladie déclaré par le salarié (Cass. Soc. 18 septembre 2024, n° 22-22.782).

 

Dans l’espèce ayant donné lieu à cet arrêt, un salarié victime d’un accident, reconnu comme accident du travail par la CPAM, avait fait l’objet d’une mesure de licenciement pour inaptitude, sans toutefois bénéficier des dispositions protectrices applicables aux salariés dont l’inaptitude est d’origine professionnelle. Estimant n’avoir pas été rempli de ses droits, il a saisi la juridiction prud’homale afin d’obtenir le paiement de diverses sommes au titre de la rupture de son contrat de travail, notamment l’indemnité spéciale de licenciement.

 

Considérant que le salarié n’apportait pas la preuve de la réalité de l’accident du travail dont il indiquait avoir été victime, la Cour d’appel de Paris l’a débouté de ses demandes :

 

« Il appartient au salarié de rapporter la preuve de l’accident du travail, la juridiction prud’homale appréciant son existence de manière autonome, indépendamment de la juridiction de sécurité sociale et de la CPAM.

 

En l’espèce, le salarié n’apporte aucun témoignage, ni aucun document médical qui permettrait d’accréditer la thèse d’une lésion brutale et soudaine.

 

(…)

 

Ainsi, faute de témoin direct et de constatations matérielles, un doute existe sur l’existence de l’accident du travail et celui-ci ne sera pas reconnu par la cour.

 

Par suite, l’inaptitude d’origine professionnelle sera pareillement écartée et les demandes en paiement d’un complément d’indemnité spéciale de licenciement, d’une indemnité compensatrice de préavis et de l’indemnité de congés payés y afférents seront rejetés. De même le salarié sera débouté de ses demandes de délivrance d’un bulletin de paie conforme à la décision ».

 

Sa décision est cassée par la Cour de cassation, qui rappelle expressément que le juge prud’homal n’a pas compétence pour remettre en cause l’existence même d’un accident du travail reconnu par la caisse d’assurance maladie.

 

Selon la Cour de cassation, en effet, dès lors qu’une décision de reconnaissance de l’accident existe, « cette décision s’impose au juge prud’homal » auquel il revient seulement « de se prononcer sur le lien de causalité entre cet accident ou cette maladie et l’inaptitude et sur la connaissance par l’employeur de l’origine professionnelle de l’accident ou de la maladie ».

 

Une telle solution a le mérite de clarifier les contours du principe d’autonomie du droit du travail par rapport au droit de la sécurité sociale, consacré de longue date par les juges, qui considèrent de façon constante que « la décision de reconnaissance d’une maladie professionnelle par la caisse primaire d’assurance maladie est sans incidence sur l’appréciation par le juge prud’homal de l’origine professionnelle ou non de l’inaptitude » (Cass. Soc. 13 février 2013, n° 11-26.887).

 

En pratique, ce principe permet notamment au juge prud’homal de juger qu’une inaptitude n’est pas d’origine professionnelle nonobstant l’existence d’une décision de prise en charge d’un accident ou d’une maladie par une CPAM.

 

Il est toutefois limité à l’appréciation du lien existant ou non entre l’accident ou la maladie et l’inaptitude physique constatée du salarié, qui peut avoir une autre cause.

 

Il ne permet en revanche pas au juge prud’homal d’apprécier l’existence de l’accident du travail ou de la maladie professionnelle « de manière autonome, indépendamment de la juridiction de sécurité sociale et de la CPAM », contrairement à ce qu’avait retenu la Cour d’appel de Paris.

 

https://www.courdecassation.fr/decision/66eab8eb49e2d93736d98a83?search_api_fulltext=&date_du=&date_au=&judilibre_juridiction=cc&judilibre_chambre%5B0%5D=soc&op=Rechercher%20sur%20judilibre&previousdecisionpage=&previousdecisionindex=&nextdecisionpage=0&nextdecisionindex=1

 

https://www.courdecassation.fr/decision/66eab8e849e2d93736d98a7f?search_api_fulltext=&date_du=&date_au=&judilibre_juridiction=cc&judilibre_chambre%5B0%5D=soc&op=Rechercher%20sur%20judilibre&previousdecisionpage=0&previousdecisionindex=1&nextdecisionpage=0&nextdecisionindex=3

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