Par un arrêt du 18 juin 2025 (23-19.022), le Cour de cassation a jugé qu’un salarié pouvait demander à son employeur l’accès à ses courriels professionnels, ceux-ci étant considérés comme des données à caractère personnel au sens de l’article 4 du RGPD.
Au cas d’espèce, un salarié engagé en qualité de Directeur du développement a été licencié pour faute grave à la suite d’une enquête interne diligentée en raison de plaintes de salariées portant sur des comportements déplacés de nature sexiste ou à connotation sexuelle à leur encontre.
Ce dernier a contesté cette mesure de licenciement devant le juge prud’homal et a formulé des prétentions pécuniaires afférentes, ainsi qu’une demande des dommages et intérêts en raison du refus de son ancien employeur de lui communiquer ses courriels échangés pendant la relation de travail.
Le Conseil de prud’hommes l’ayant débouté de ses demandes, le salarié a relevé appel de ce jugement.
En appel, les juges du fond ont infirmé le jugement de première instance, en considérant notamment que la Société ne versait pas aux débats l’intégralité des comptes-rendus d’entretiens réalisés lors de l’enquête interne, et que la plupart étaient anonymisés, si bien que leur valeur probante était remise en cause, « le doute profitant au salarié ».
Les juges du fond ont également condamné la Société au paiement de dommages et intérêts pour non-respect du droit d’accès aux données personnelles du salarié.
La Société a donc formé un pourvoi en cassation à l’encontre cet arrêt d’appel.
Aux termes d’un arrêt rendu le 18 juin 2025, la Haute Juridiction a rejeté le pourvoir ainsi formé par la Société et a jugé :
- d’une part, s’agissant du rapport d’enquête interne, que sa valeur probante était laissée à l’appréciation des juges du fond au regard des autres éléments de preuve produits ;
- d’autre part, que « les courriels émis ou reçus par le salarié grâce à sa messagerie électronique professionnelle sont des données à caractère personnel au sens de l’article 4 du RGPD », et que « le salarié a le droit d’accéder à ces courriels, l’employeur devant lui fournir tant les métadonnées (horodatage, dentinaires) que leur contenu, sauf si les éléments dont la communication est demandée sont de nature à porter atteinte aux droits et libertés d’autrui ».
Par cette décision, la Cour de cassation semble s’aligner avec la position de la CNIL qui avait considéré, dans une fiche technique du 5 janvier 2022 (actualisée en janvier 2025: cf. ci-dessous), que « toute personne peut demander à un organisme la communication des données qu’il détient sur elle et en obtenir une copie. Un salarié peut ainsi demander à son employeur l’accès et la communication des données personnelles qu’il a en sa possession, y compris celles contenues dans les courriels ».
Cette solution va vraisemblablement produire des effets sur le droit à la preuve, notamment dans le cadre de litiges prud’homaux.
https://www.cnil.fr/fr/le-droit-dacces-des-salaries-leurs-donnees-et-aux-courriels-professionnels