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Application à géométrie variable du délai de 30 jours pour envoyer le courrier de licenciement pour motif économique de 10 salariés ou plus dans les entreprises de moins de 50 salariés

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Les délais prévus à l’article L. 1233-39 du Code du travail pour l’envoi des lettres de licenciement prononcé pour un motif économique ne sont pas applicables en cas de redressement ou de liquidation judiciaire, ainsi qu’il ressort d’un arrêt de la Cour de cassation en date du 17 mai dernier (n°21-21.041).

A cet égard, dans le cadre du licenciement pour motif économique de 10 salariés ou plus sous 30 jours dans les entreprises de moins de 50 salariés, l’article L. 1233-39 du Code du travail prévoit que :

« Dans les entreprises de moins de cinquante salariés, l’employeur notifie au salarié le licenciement pour motif économique par lettre recommandée avec avis de réception.

La lettre de notification ne peut être adressée avant l’expiration d’un délai courant à compter de la notification du projet de licenciement à l’autorité administrative.

Ce délai ne peut être inférieur à trente jours.

Une convention ou un accord collectif de travail peut prévoir des délais plus favorables aux salariés (…) ».

La Cour de cassation, dans son arrêt du 17 mai 2023, précise pour la première fois, à notre connaissance, que ces délais (30 jours selon le Code du travail ou plus favorables selon une convention ou un accord collectif) ne sont pas applicables en cas de redressement ou de liquidation judiciaire.

En l’espèce, l’employeur, comptant moins de 50 salariés, a été placé en redressement judiciaire selon jugement du tribunal de commerce de Paris le 8 novembre 2018, puis a bénéficié d’un plan de continuation par jugement du 20 décembre 2019, la société étant à nouveau in bonis.

Dans l’intervalle, une salariée a fait l’objet d’un licenciement économique collectif (16 salariés) le 15 janvier 2019.

Cette dernière a contesté la procédure de licenciement, estimant que la société lui avait notifié son licenciement avant l’expiration du délai de 30 jours visé à l’article L.1233-39 du Code du travail, ce qui entraînait l’irrégularité de la procédure de licenciement, dont elle pouvait demander la réparation.

De son côté, le raisonnement de la société était le suivant :

  • certes, l’article L. 1233-39 du Code du travail prévoit qu’un délai de 30 jours doit être observé dans les entreprises de moins de cinquante salariés,
  • cependant, à situation exceptionnelle, application de dispositions légales spéciales, dont relève l’article L. 631-17 du Code de commerce, lequel prévoit que lorsque des licenciements pour motif économique présentent un caractère urgent, inévitable et indispensable pendant la période d’observation, l’administrateur peut être autorisé par le juge-commissaire à procéder à ces licenciements,
  • d’ailleurs, compte tenu de l’article L. 1233-59 du Code du travail qui prévoit l’inapplicabilité des délais pour l’envoi des lettres de licenciement pour motif économique de moins de 10 salariés en cas de redressement ou de liquidation judiciaire, il ne devrait pas être fait application de ce délai de 30 jours dans le cadre d’un licenciement collectif de plus de 10 salariés.

Une telle démonstration permettait ainsi à la société, compte tenu de sa situation particulière, face à l’urgence de procéder à des licenciements pour motif économique, et par analogie avec les licenciements collectifs de moins de 10 salariés, de s’exonérer du respect de ce délai de 30 jours.

La Cour d’appel de Bourges a refusé d’appliquer un tel raisonnement, jugeant que :

  • si la salariée a bien été licenciée pendant la période d’observation, au cours de laquelle seuls peuvent être prononcés les licenciements présentant un caractère urgent, inévitable et indispensable conformément à l’article L. 631-17 du Code de commerce,
  • ce dernier article ne dispensait pas l’employeur de respecter ce délai de 30 jours, rappelant ainsi que l’article L. 1233-59 du Code du travail n’avait pas à s’appliquer dans ce litige où cet article vise les délais applicables au licenciement individuel et de moins de 10 salariés dans une même période de 30 jours.

La Cour de cassation censure la Cour d’appel : tout comme pour les licenciements de moins de 10 salariés sur 30 jours en cas de redressement ou de liquidation judiciaire, les délais figurant à l’article L.1233-39 du Code du travail ne sont pas davantage applicables :

« (…) les délais prévus à l’article L. 1233-39 du code du travail pour l’envoi des lettres de licenciement prononcé pour un motif économique ne sont pas applicables en cas de redressement ou de liquidation judiciaire ».

Une telle décision permet ainsi d’uniformiser le régime de l’envoi des courriers de licenciement, selon que le licenciement collectif soit de moins de 10 salariés ou plus de 10 dans une société de moins de 50 salariés – et ce, alors même que le Code du travail ne prévoyait pas une telle hypothèse.

https://www.courdecassation.fr/decision/646478055c7899d0f88f899c?search_api_fulltext=&date_du=&date_au=&judilibre_juridiction=cc&judilibre_chambre%5B%5D=soc&judilibre_publication%5B%5D=b&judilibre_publication%5B%5D=r&judilibre_publication%5B%5D=l&judilibre_publication%5B%5D=c&judilibre_solution%5B%5D=cassation&judilibre_solution%5B%5D=avis&op=Rechercher+sur+judilibre&previousdecisionpage=0&previousdecisionindex=0&nextdecisionpage=0&nextdecisionindex=2

 

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