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Le juge doit examiner l’ensemble des griefs en cas de licenciement, y compris en cas d’atteinte à une liberté fondamentale

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Dans un arrêt du 19 octobre 2022 (n°21-15.533), la Cour de cassation revient notamment sur le montant de l’indemnité à laquelle un employeur peut être condamné lorsqu’il licencie l’un de ses salariés et que l’un des motifs utilisés constitue la violation d’une liberté fondamentale.

 

En l’espèce, un employeur a notifié un avertissement à l’une de ses salariées fondé sur une absence injustifiée. Cette dernière l’a contesté devant le Conseil de prud’hommes en sollicitant par ailleurs la résiliation judiciaire de son contrat de travail considérant que ledit avertissement était illégal, que certains des actes qu’elle devait effectuer n’étaient pas de sa compétence, que ses heures supplémentaires ne lui étaient pas payées et, enfin, qu’elle n’était pas suivie médicalement.

 

Suivant cette action judiciaire, l’employeur a notifié à la salariée son licenciement, lui reprochant d’avoir refusé des changements ponctuels d’emploi du temps, son attitude envers certains patients, l’absence de commande réalisée malgré les impératifs du cabinet et enfin en raison de la procédure prud’homale qu’elle avait engagée qui « rend quasiment impossible la cohabitation ». C’est ce dernier motif qui nous intéresse dans le cas présent.

 

La Cour d’appel a considéré ces motifs insuffisamment graves pour justifier la résiliation judiciaire du contrat de travail et a confirmé le jugement rendu par le Conseil de prud’hommes. Cependant elle a jugé le licenciement notifié nul, dès lors qu’il était, pour partie, fondé sur l’exercice par la salariée d’une action en justice, et a condamné, en conséquence, la société au versement de dommages et intérêts à hauteur de 16 mois de salaire.

 

La Société a formé un pourvoi en cassation à l’encontre de cette décision en considérant que les juges du fond n’avaient pas examiné l’ensemble des griefs reprochés à la salariée, qui leur auraient permis de mieux déterminer l’indemnité à verser au salarié.

 

La Cour de cassation a suivi l’argumentation de l’employeur en jugeant qu’ « aux termes de l’article L. 1235-2-1 du Code du travail, en cas de pluralité de motifs de licenciement, si l’un des griefs reprochés au salarié porte atteinte à une liberté fondamentale, la nullité encourue de la rupture ne dispense pas le juge d’examiner l’ensemble des griefs énoncés, pour en tenir compte, le cas échéant, dans l’évaluation qu’il fait de l’indemnité à allouer au salarié, sans préjudice des dispositions de l’article L. 1235-3-13. Ces dispositions offrent ainsi à l’employeur un moyen de défense au fond sur le montant de l’indemnité à laquelle il peut être condamné, devant être soumis au débat contradictoire ».

 

Elle a toutefois relevé que l’employeur n’avait pas contesté le montant de l’indemnité demandé par la salariée.

 

En d’autres termes, l’employeur a la possibilité d’invoquer plusieurs motifs de licenciement et, quand bien même l’un des griefs porte atteinte à une liberté fondamentale, les juges du fond sont tenus d’examiner tous les griefs reprochés au salarié. L’étude de ces griefs permet aux juges d’évaluer l’indemnité à verser au salarié par l’employeur, laquelle est, en tout état de cause, soumise à un plancher de six mois de salaire lorsque le salarié n’est pas réintégré.

 

Ainsi, dans le cas présent, alors que l’un des griefs de l’employeur portait atteinte à une liberté fondamentale, à savoir le droit du salarié d’ester en justice, les autres griefs devaient être étudiés, à condition toutefois que l’employeur ait contesté en amont le montant sollicité par le salarié. L’examen des griefs n’aura donc d’impact que sur le montant de l’indemnité à verser au salarié.

 

Cet arrêt a un second apport puisqu’il précise en outre que le remboursement à Pôle Emploi des indemnités chômage versées (dans la limite de six mois) ne peut être ordonné que dans les cas limitativement énumérés par l’article L. 1235-4 du Code du travail et donc pas dans le cas de l’espèce. Pas de remboursement sans texte…

 

https://www.courdecassation.fr/decision/634f93f3b5afe5adfff287fe?search_api_fulltext=&date_du=&date_au=&judilibre_juridiction=cc&judilibre_chambre%5B%5D=soc&op=Rechercher+sur+judilibre&previousdecisionpage=0&previousdecisionindex=1&nextdecisionpage=0&nextdecisionindex=3

 

 

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